[Article initialement publié sur le blog du MBA MCI le 13/09/18]
NB : cet article est une synthèse de ma visite au salon Paris Retail Week et ce que j’en ai retenu. C’est pourquoi il reprend beaucoup de mes tweets de l’événement. Ce n’est évidemment pas exhaustif.
L’alliance intelligente du digital et du retail physique
Cette année, le salon Paris Retail Week était placé sous le signe du phygital, et même du smart phygital. Alors qu’est-ce que le phygital ? Ce mot né en 2013 de la contraction des mots « physique » et « digital » renvoie à la digitalisation des points de vente. Cette définition est un peu réductrice aujourd’hui et on l’emploie maintenant plus volontiers pour évoquer la convergence inévitable du commerce online et offline pour n’en faire qu’un unifié et connecté.
Cette réunion des 2 mondes s’est d’ailleurs matérialisée physiquement dans le salon par la réunion des 2 anciens salons Equipmag & E-Commerce.
Le fait de découvrir dans les allées du salon à la fois les dernières innovations technologiques en termes d’intelligence artificielle, de data management… mais aussi le matériel d’agencement des rayons, la PLV, les cartons d’emballage est assez symbolique de la réalité du commerce d’aujourd’hui : à la fois opérationnel et stratégique, pragmatique et conceptuel
« la tête dans le cloud mais les pieds sur terre » !
L’attribut « Smart » quant à lui soulève l’importance de ne pas faire de la techno pour de la techno mais de bien réfléchir avant aux usages, de bien comprendre les attentes et besoins clients.
Fort à propos, Pierre Villeneuve (CEO d’HxLab, ex directeur de la relation client d’IKEA France) que j’ai croisé sur le salon, me révélait d’ailleurs avoir créé un outil baptisé le « Digutile© » :
« le digital doit être utile, utilisable et utilisé sinon ce n’est pas la peine ».
Smart renvoie également à la capacité des enseignes à se réinventer, à être agile dans un monde de plus en plus complexe et des clients de plus en plus exigeants comme si bien résumé dans ce tweet :
Pas une tendance phare mais plusieurs…
Bien que de nombreuses tendances ont été présentées lors de ce salon comme celles d’Havas en plénière d’ouverture ci-dessous
beaucoup s’accordent à dire qu’il n’y a pas eu une tendance phare, émergeante de ce salon. C’est sans doute parce qu’il y en a plusieurs et que les retailers ont compris qu’il ne fallait pas se ruer sur la dernière innovation ou le dernier buzz word mais plutôt de se poser les bonnes questions, de bien réfléchir en amont, de ne pas mettre la cerise sur le gâteau avant d’avoir fait le gâteau, de travailler sur tous les différents leviers… comme l’ont bien exprimé certains professionnels au cours des conférences :
Pour ma part, j’ai pu identifier 6 thématiques :
1) Le discours est moins catastrophiste sur la mort des magasins physiques.
Même si David Mingeon, DGA d’Havas Paris, a parlé en plénière d’ouverture des « dead malls » et de la fermeture de Toys’r’us comme 2 symboles de l’éloignement des clients vis-à-vis des magasins physiques, l’accent a plutôt été mis sur la force du point de vente physique et le dynamisme des enseignes à essayer de le rendre encore plus attractif.
Lors de son intervention en plénière de clôture, Brendan Witcher de Forrester, a d’ailleurs dit avec beaucoup d’humour que nous serions dans la salle tous morts avant les magasins ! Et de faire un rapide sondage dans la salle pour confirmer que le débat commerce physique ou e-commerce n’a plus de sens aujourd’hui :
Petit sondage dans la salle Combien de personnes ont acheté qq chose cette année ? 100%
Combien ont acheté en ligne ?100%
Combien en magasin ? 100%
Nous sommes tous des consommateurs omnicanal ! CQFD@forrester #ParisRetailWeek #mbamci pic.twitter.com/KHT2MsPuNX— Sophie Malka (@SophieMalka) 12 septembre 2018
Il y a une nouvelle façon de faire du commerce, fusion des 2 mondes, complémentarité et synergie et c’est ce que les chinois (d’ailleurs très présents cette année sur le salon) appellent le new retail comme nous l’indique David Schwarz, VP E-commerce de Carrefour qui a récemment fait alliance avec Tencent.
Mais même si les magasins représentent près de 90% des ventes encore et le e-commerce près de 10%, il a été beaucoup souligné l’importance de l’influence du online sur les ventes offline et de son explosion ces dernières années
2) Le client enfin de retour au coeur des préoccupations
On a aussi beaucoup parlé du client, de ses attentes, de ses besoins, de son parcours…
On essaye de mieux le comprendre pour mieux le satisfaire : ça paraît évident dit comme ça mais ça semblait s’être perdu pendant des années.
3) Et quand on parle client, souvent on parle data
Bien évidemment, pour mieux connaître et comprendre le client, il y a les études bien sûr qui nous donne les macro-tendances mais il y a surtout les données personnelles, les données comportementales tout au long du parcours client. On a ainsi pu entendre les expressions « Data is the new oil » et «pas de data, pas de chocolat » pour exprimer l’importance et l’enjeu de bien récolter, analyser et utiliser ses datas.
Mais il a été moins question de la collecte que de l’utilisation qui en est faite non seulement du point de vue de l’enseigne (pourquoi est-ce si important ? A quoi ça me sert dans l’amélioration de mon business ?) mais aussi du point de vue du client (comment la data permet une meilleure personnalisation de l’offre ?) et enfin du point de vue sécurité (que va t’on faire de ma donnée ?), les professionnels ayant tous bien évidemment le RGDP en tête.
4) La technologie oui mais d’abord pour régler les irritants
Quand on parle des attentes clients, on voit finalement qu’elles restent basiques, ils veulent de la simplicité, de la praticité et de l’efficacité. Et la grande priorité des retailers c’est de s’attacher à régler les irritants clients comme l’attente en caisse ou les ruptures de stock et d’acquérir la techno qui le leur permet.
Et on a vu que les distributeurs alimentaires sont très actifs dans le domaine : Carrefour, Monoprix, Leclerc, Auchan et consorts multiplient les initiatives et notamment pour aller plus vite en s’alliant avec les grands acteurs du digital Amazon, Alibaba, Tencent, Google (voir mon infographie et mon article sur ces alliances)
Magasin sans caisse, Scan&Go, Assistant Vocal, caddies connectés…tout est fait pour que les courses ne soient plus une corvée.
Dans le prêt-à-porter, ce sont les cabines connectées qui ont le vent en poupe car c’est souvent vécu comme une mauvaise expérience (parfois sombre, sale et étroit, besoin de se rhabiller et de ressortir de la cabine pour demander une taille… ). Etam & Kiabi ont commencé à faire des tests dans le domaine.
Et on a vu des exemples dans les allées du salon :
La cabine d essayage connectée permet de voir les articles portés et d interagir avec un vendeur pour qu il nous apporte directement différentes tailles ou modèles @Fujitsu_France @PRWOfficial #MBAMCI #ParisRetaikWeek pic.twitter.com/3RJWfTyNuo
— Solenn Castelbou (@scastelbou) 11 septembre 2018
5) Vers toujours plus d’expérience
Tout le monde est d’accord aussi pour dire qu’il faut offrir une expérience en magasin, ou en tous cas autre chose que le simple fait de vendre des produits.
C’est d’ailleurs une forte attente des clients
J’en avais d’ailleurs parlé dans mon dernier article « désolé vous n’avez pas assez d’expérience »
Comme tout est disponible en ligne depuis son canapé ou son mobile, le client doit être récompensé s’il vient en magasin.
Influencia a identifié 10 façons de révolutionner le retail. Alors bien souvent dans ces cas là, et c’est normal puisqu’il s’agit d’anticiper des tendances, on nous montre de très beaux concepts, généralement des flagships, plutôt premium ou de niche, très éloignés de la réalité de nos commerces du quotidien et parfois difficilement adaptables. Dans le lot, il y en a un que j’ai trouvé très malin et que le retail dit plus « mass market » peut s’approprier : c’est le magasin « glocal » ou comment adapter le point de vente au quartier où on se trouve. Il s’agit de la marque American Eagle qui propose un lavomatic gratuit dans son point de vente situé dans le quartier des universités de New York afin d’offrir aux étudiants une double raison de venir : faire son linge pendant qu’on fait son shopping à moins que ce ne soit l’inverse s’occuper pendant la corvée de linge !
L’expérience c’est aussi ce qu’a bien compris le magasin Aroma Zone que j’ai pu visiter lors du Retail Tour organisé par le salon. En effet, ce magasin de cosmétiques combine la plupart des attentes des clients :
– le mieux consommer (produits éthiques, bio, naturels)
– le DIY : ici on vend tout pour faire soi même ses produits
– les atouts du digital : tablettes, click&collect
– les conseils de vendeurs experts
– l’expérientiel avec des ateliers thématiques pour apprendre à fabriquer ses produits
– et même le fait d’occuper les enfants pendant le shopping des parents !
Visite d’@AromaZone_ magasin de cosmétiques naturels et éthiques à faire soi même. Un concept flagship qui mixe DIY, bio, expérientiel (ateliers), conseil client (beaucoup de vendeurs), #omnicanal (click & collect avec caisse dédiée , tablettes) #ParisRetailTour #mbamci pic.twitter.com/MBMPDTiQvm
— Sophie Malka (@SophieMalka) 11 septembre 2018
Les services à valeur ajoutée et qu’on ne peut pas faire en ligne font partie des facteurs clés de succès pour le retail de demain. Lors du retail tour, j’ai aussi pu visiter le flagship parisien de Nocibe, ouvert pour installer davantage la marque dans la capitale et séduire l’exigeante clientèle parisienne et touristiques. Entre autres services proposés, on trouve le diagnostic de peau personnalisé que j’ai pu tester pour vous 😀
Pour découvrir les autres magasins du RetailTour, je vous invite à lire les 2 articles de Dalila Bouaziz dans e-marketing :
– http://www.e-marketing.fr/Thematique/retail-1095/Diaporamas/paris-retail-week-decouverte-nouveaux-magasins-connectes-333637/magasin-omnicanal-leroy-merlin-333638.htm
6) L’humain et les vendeurs comme l’une des principale valeur ajoutée du magasin
« le souvenir que garde un client après une visite en magasin c’est son contact avec le vendeur et encore plus la petite anecdote qu’il lui aura racontée »
Régine Van Heems, l’observatoire du commerce connecté
Et les outils digitaux peuvent améliorer cette expérience avec le vendeur :
– les prises de rdv en ligne comme déployé chez Go Sport récemment afin de permettre au client avec un besoin de conseil et d’expertise d’être pris en charge lors de son arrivée en magasin
– les dispositifs mobiles pour vendeurs permettant de mieux connaître le client (grâce à la carte de fidélité et l’historique des achats), de mieux connaître les produits (fiches produits), de connaître la disponibilité des produits dans d’autres magasins, de commander des articles en ligne…et bien sûr l’encaissement mobile.
Ainsi la machine est au service de l’humain, comme nous le rappelle Fabien Versavau, DGA Rakuten France
Ma perception après 3 jours de salon est un grand optimisme et une forte détermination de la part des retailers pour réinventer le commerce de demain, en écoutant mieux le client et en le mettant au cœur de ses projets innovants qu’ils soient technologiques, serviciels ou expérientiels.
Les thématiques abordées dans cet article seront approfondies dans ma thèse à paraître bientôt :
« Au-delà de la complémentarité du digital et du retail physique, comment les retailers doivent-ils se réinventer et pour quelles attentes clients ?
Source : Mon live tweets du salon https://twitter.com/i/moments/1038784049660272640es t